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5 MAI 1821 : MORT DE NAPOLÉON

5 MAI 1821 : MORT DE NAPOLÉON

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Maggio 5, 2023    
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• Lisons, de Férdéric Masson, Napoléon à Sainte-Hélène

A cinq heures cinquante minutes éclate le coup de canon de retraite, le soleil disparaît, l’Empereur est mort.

Le premier, le Grand maréchal s’approche du lit et, le genou en terre, il baisa la main de son maître, et tous après lui, les serviteurs selon leur ordre, les femmes, les enfants Bertrand que leur mère a fait chercher, la fille de Saint-Denis, – à. peine âgée d’un an, – dont on pose les lèvres sur la main glacée.

Le docteur Arnott est allé prévenir l’officier d’ordonnance Grokatt, qui constate la mort, puis arrivent deux médecins envoyés par le gouverneur.

Suivant les ordres qu’a donnés l’Empereur, les exécuteurs testamentaires se réunissent dans le billard pour dresser les procès-verbaux et prendre connaissance des deux codicilles en date des 15 et 16 avril, par lesquels l’Empereur témoigne sa volonté quant au lieu de sa sépulture, fait à ses exécuteurs testamentaires une donation fictive de tout ce qu’il possède, distribue entre ses-serviteurs les 300.000 francs de sa réserve, et attribue à sa mère, ses soeurs, frères et neveux, divers objets mobiliers, indépendamment de ceux légués par le testament.

On rédige alors l’acte de décès, que Bertrand dresse comme grand officier de la Maison, puis les procès-verbaux d’existence du testament et des codicilles, et des dépôts confiés à Montholon, Bertrand et Marchand.

Montholon donne ensuite lecture d’une lettre que l’Empereur lui a dictée, dans la journée du 29 avril pour être, après sa mort, adressée .au gouverneur.-.Par cette lettre, où la date a été laissée en blanc, Montholon annonce au gouverneur la mort de « l’Empereur Napoléon» offre de communiquer ses dernières volontés, demande quelles sont les dispositions prescrites par le Gouvernement britannique pour le transport du corps en Europe, ainsi que celles relatives aux personnes de la suite.

A minuit, les quatre serviteurs, Marchand, Saint-Denis, Pierron et Noverraz font au corps sa dernière toilette, en présence de Bertrand et de Montholon, et ils le transportent du lit mortuaire dans le second lit de campagne préparé à cet effet et mis à la place de celui qu’ils ont sorti. Ils enlèvent la plupart des meubles, approchent du lit deux petites consoles sur lesquelles ils placent les girandoles de la chapelle. L’abbé Vignali pose sur la poitrine de l’Empereur un crucifix d’argent.

« Dans cet état, l’Empereur, dit Marchand, avait sa figure de consul; sa bouche, légèrement contractée, donnait a sa figure un air de satisfaction.et il ne paraissait pas avoir au delà de trente ans. » Plus tard et surtout lorsque, après deux jours, on moula le visage, l’affaissement des chairs lui donnait un air de vieillesse et lui enlevait de sa beauté.
• et de Saint-Denis, Souvenirs du Mameluck Ali sur l’Empereur

Sur les quatre heures du matin, le peu de repos qu’on avait pris avait fait disparaître entièrement le sommeil. Nous allâmes près du lit. Le souffle qui s’échappait de la bouche de l’Empereur était si faible que nous crûmes un moment qu’il n’existait plus. Nous approchâmes la lumière: il avait les yeux ouverts, mais ils semblaient paralysés; la bouche était quelque peu ouverte. Dès ce moment, nous ne nous éloignâmes plus du lit et, à des instants assez rapprochés, on donnait au mourant quelques gouttes d’eau qu’il avalait avec difficulté.

Toute la journée s’écoula sans aucun changement sensible. Les deux médecins, le Grand-Maréchal et Mme Bertrand, le général Montholon, Marchand et les personnes de la maison étaient rangées en grande partie devant le lit, et quelques-unes du côté opposé; tous avaient les yeux fixés sur la figure de l’Empereur, qui n’avait d’autre mouvement que le mouvement convulsif que lui donnait le hoquet.

C’était Antommarchi qui, placé au chevet du lit, donnait un peu d’eau à l’Empereur pour lui humecter la bouche, d’abord avec une cuiller, ensuite avec une éponge. Fréquemment il lui tâtait le pouls soit au poignet, soit à la jugulaire. La veille, il lui avait mis des sinapismes aux pieds et un vésicatoire sur l’estomac. Celui-ci ne produisit d’autre effet que de faire soulever la peau par places.

Vers le milieu de la journée, les enfants du Grand-Maréchal vinrent voir l’Empereur; je crois que l’aîné, Napoléon, se trouva mal. Sauf quelques moments d’absence des uns et des autres pour aller prendre quelques aliments, tout le monde resta constamment auprès de l’Empereur de qui bientôt la vie allait se retirer,

Enfin, à six heures dix du soir, le 5 mai, une minute et demie après le coup de canon de retraite, l’Empereur expira. Chaque souffle, qui d’abord avait été régulièrement espacé, devint progressivement et successivement plus éloigné, et le dernier, plus lent que ceux qui l’avaient précédé, ne fut plus que l’expiration d’un soupir prolongé. En vain nous attendîmes une autre aspiration et une autre expiration…

Hélas ! il ne restait plus de l’Empereur que la dépouille mortelle!… A ce moment suprême, tous les yeux se remplirent de larmes. Quel triste et sublime spectacle que la mort d’un grand homme et d’un homme taillé comme Napoléon ! Si ses ennemis eussent été là présents, leurs yeux aussi se fussent mouillés et ils eussent pleuré sur ce corps privé de vie.

Dès que tous les assistants furent un peu remis de leur douloureuse émotion, le Grand-Maréchal se leva de son fauteuil et, le premier, baisa la main de l’Empereur et tous sans exception suivirent son exemple. Alors, les sanglots éclatèrent et les larmes coulèrent avec plus d’abondance.

Pendant ses derniers jours, l’Empereur était resté constamment dans la même position: couché sur le dos, la tête droite sur l’oreiller, le bras droit allongé sur le lit, le bras gauche placé le plus souvent comme le droit, avec cette différence qu’il mettait parfois sa main sur sa poitrine et que parfois cette main tenait le cordon qui était attaché aux pommes des deux montants du dossier du lit. Sur ce cordon était son mouchoir. Il avait les cuisses écartées et les talons rapprochés. L’Empereur est mort sans la moindre convulsion sensible et sans la moindre crispation; il s’est éteint comme s’éteint la lumière d’une lampe.

Immédiatement après le baisement de la main de l’Empereur, le Grand-Maréchal, M. de Montholon, Marchand et l’abbé Vignaly passèrent dans le parloir, où Marchand remit à M. de Montholon le paquet contenant le testament et les codicilles. Les cachets ayant été reconnus intacts, l’abbé Vignaly rentra seul dans le salon et les trois autres procédèrent à l’ouverture des différents plis. MM. de Montholon, Bertrand, Marchand s’y virent nommés exécuteurs testamentaires. M. de Montholon était nommé le premier.

Par un codicille particulier, l’Empereur donnait à chacun des exécuteurs testamentaires, sur l’argent qu’il avait à Longwood, 50000 francs, et ordonnait qu’il fût remis à chacun de ses serviteurs une somme plus ou moins forte selon leurs gages et le temps de leur service, pour subvenir aux frais de leur retour en Europe. Par un autre codicille, il léguait à ses exécuteurs testamentaires son argent, ses bijoux, argenterie, porcelaine, meubles, livres, armes, et tout ce qui lui appartenait à Sainte-Hélène.

Par le même acte, il désirait que ses cendres reposassent sur les bords de la Seine, au milieu de ce peuple français qu’il avait tant aimé. L’Empereur avait donné des instructions pour ses funérailles et avait désigné l’endroit où il voulait être inhumé, si le gouvernement anglais ne voulait pas permettre que son corps fût transporté en Europe.

Dès que l’Empereur avait eu cessé de vivre, M. Antommarchi lui avait fermé les yeux et peu après lui avait mis un mouchoir sous le menton, noué sur la tête, pour que la bouche, qui était quelque peu ouverte, fût fermée. Une petite contraction qui s’était manifestée a la lèvre supérieure resta, laissant voir deux ou trois dents de devant. La tête de l’Empereur avait quelque chose des belles médailles antiques. Le buste était beau, les mains, qui s’étaient un peu amaigries, étaient du plus parfait modèle; elles ressemblaient à de belles mains de femme.
Aussitôt que les exécuteurs testamentaires eurent pris connaissance des testament et codicilles, ils rentrèrent dans le salon. Le lustre fut allumé. Tous les Français se rangèrent à droite et à gauche du lit et MM. Schort et Mitchell, accompagnés de l’officier d’ordonnance, le capitaine Crokat, qui avait remplacé depuis quelques semaines le capitaine Nicholls, entrèrent pour constater la mort; ils examinèrent, ils palpèrent le corps de l’Empereur; après quoi, ces messieurs se retirèrent.

Au mouvement succéda le plus grand calme, le calme de la mort. Deux ou trois serviteurs restèrent pour veiller. Toutes les autres personnes s’en allèrent chacune chez elle. C’était la première nuit que nous allions passer sans l’Empereur. Marchand et moi, nous nous étions fatigués; nous avions pleine liberté de prendre du repos, et malgré cela, le sommeil n’eut pas le pouvoir de nous engourdir. Nous étions enfoncés l’un et l’autre dans les plus tristes et plus profondes réflexions.

Cette liberté, que nous allions avoir, allait être pour nous, pauvres serviteurs, un fardeau bien pesant; mieux valait l’état de douce servitude dans lequel nous avions vécu et auquel nous étions habitués. Jusqu’ici, nous n’avions eu nul souci de l’avenir; quelqu’un avait pensé pour nous, et pour nous, ce quelqu’un, l’Empereur, était et devait être tout. Lui vivant, heureux ou malheureux, nous avions un appui, un soutien; mort, nous restions sans protection et abandonnés à nous-mêmes. Après lui, il n’y avait personne à qui nous pussions nous rattacher. En perdant l’Empereur, nous perdions tout ce que nous avions de plus cher au monde.

Dans la soirée, Marchand, ma femme et moi, nous étions seuls dans le salon, assis sur le canapé qui est près de la porte de la salle à manger. Ma femme avait sa fille sur ses bras. Nous causions à voix basse sur l’Empereur, dont le corps était gisant à quelques pas de nous. Marchand, je ne sais plus à quelle occasion, prend mon enfant, se dirige vers le lit, et lui fait poser les lèvres sur la main à peine refroidie de l’Empereur…

Minuit arrivé, Marchand, Noverraz, Pierron et moi nous enlevâmes le corps et le posâmes sur l’autre lit de campagne. Nous osions à peine toucher ce corps: il nous semblait qu’il possédât quelque vertu électrique. Nos mains qui étaient tremblantes ne le touchaient qu’avec un respect mêlé de crainte… O pouvoir de l’imagination ! Et cependant cette enveloppe de l’Empereur était froide comme le marbre.

Aussitôt que le corps eut été rendu net et que Noverraz eut fait la barbe, nous le remîmes sur le premier lit qui avait été refait et placé entre les deux fenêtres comme précédemment; nous le couvrîmes d’un drap laissant la figure à découvert.