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28 FÉVRIER 1812 – CATASTROPHE MINIÈRE DE BEAUJONC – LE MINEUR HUBERT GOFFIN DÉCORÉ DE LA LÉGION D’HONNEUR

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28 FÉVRIER 1812 - CATASTROPHE MINIÈRE DE BEAUJONC - LE MINEUR HUBERT GOFFIN DÉCORÉ DE LA LÉGION D’HONNEUR

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Febbraio 28, 2023    
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Hubert Goffin, 41 ans, père de sept enfants, mineur du pays de Liège, sera décoré de la Légion d’honneur pour le courage avec lequel il aura lutté contre la mort et sauvé la vie de soixante-dix de ses compagnons, au cours de la catastrophe de la mine de Beaujonc, à quelques kilomètres de Liège, le 28 février 1812.

Hubert Goffin, et ses compagnons sont “au fond” quand, subitement, l’eau fait irruption avec violence par une brèche dans le puits de mine au dessus d’eux et commence à envahir les galeries. Reconnaissant le danger, il envoie chercher son fils Matthieu, âgé de 12 ans. A ce moment là, tous les mineurs sont encore dans les galeries, et le niveau de l’eau n’est pas trop haut. Hubert Goffin pourrait échapper immédiatement au danger avec son fils, en empruntant le panier qui remonte la houille et les hommes vers la surface, mais, maître ouvrier, il est conscient que le sort de son équipe, 127 hommes, dépend de lui, et qu’ils périront s’il les abandonne à leur sort.

Il laisse donc sa place à un de ses ouvriers dans le panier de remontée. Mais celui-ci, n’est suspendu que par deux des quatre chaînes qui habituellement le soutiennent. Il est si incliné sur le côté que certains ne peuvent s’y maintenir, et tombent au fond du puits, déjà bien envahi par l’eau. Le panier redescend pour la seconde fois. Les ouvriers, paniqués, s’y pressent, s’entassent, mais l’eau, de plus en plus puissante, en précipite certains hors du panier, qui sont difficilement repêchés par Goffin et son fils. Une troisième fois le panier redescend, les ouvriers n’ont qu’un instant pour y grimper, ils se ruent sur le panier, s’y cramponnent mais retombent pour la plupart aussitôt, et périssent au fond du puits, que maintenant l’eau a envahi.

Goffin garde l’esprit clair. Pour résister à l’eau, sous peine d’être bientôt submergé, il faut se diriger du côté d’une galerie montante. Les voilà à 170 mètres sous terre, bloqués, regroupés dans un espace étroit, privés d’aliments, respirant difficilement, et craignant à tout instant d’être engloutis par les flots qui montent à vue d’œil. La situation semble désespérée.

En haut, les ingénieurs des mines, informés de la situation, essaient de repérer où sont les éventuels survivants et cherchent comment se frayer un chemin jusqu’à eux. Malheureusement, sans informations, leurs travaux sont pendant plusieurs jours inutiles, ce qui ne diminue pas le courage et le zèle des sauveteurs.

Dans la galerie de Goffin, l’eau continue de monter. Les jeunes enfants – à cette époque on descend souvent vers l’âge de huit ans – pleurent. Il devient alors ferme, impose le silence et promet à tous qu’ils s’en sortiront. Il assigne des tâches, les plus robustes sont choisis pour entreprendre des tranchées pour se frayer une issue vers la sortie. Mais rapidement, ayant l’impression de travailler en vain, les ouvriers découragés finissent par baisser les bras.

Goffin s’énerve alors. Si telle est leur décision, soit ! Ils mourront tous, lui et son fils en premier. Ses amis se pressent autour de lui, afin, disent-ils, “que ceux qui trouveront leurs cadavres jugent qu’ils ne l’ont point abandonné”. Tous se disent adieu et se préparent à mourir. Tout à coup s’élève la voix du jeune Goffin: “Vous faites comme les enfants, vous pleurez et vous avez peur; allons, obéissez à mon père, travaillez, et prouvons que nous avons eu du courage jusqu’à la mort”.

Les travaux reprennent. Mais bientôt les forces s’épuisent; le découragement et le besoin de nourriture les accablent tous. Goffin les traite de lâches puis leur déclare qu’il va hâter sa propre mort et leur ôter tout espoir, en se noyant avec son fils. À ces mots les ouvriers se remettent à creuser. Mais l’air ne contient plus assez d’oxygène, les deux chandelles qui éclairaient les travailleurs s’éteignent d’elles-mêmes, une troisième, leur dernière ressource, s’éteint par accident. Une profonde obscurité tue le peu de courage qui jusqu’alors les animait encore. Pour la troisième fois, ils arrêtent de piocher.

Goffin, dans un geste de désespoir, saisit l’ouvrier le plus proche et menace de lui fendre le crâne ainsi qu’à tous ceux qui renonceront à creuser pour tenter de s’échapper de ce piège mortel. Tous, malgré le noir le plus absolu, se remettent au travail. Goffin lui-même donne toujours l’exemple. Son fils travaille également tout en encourageant son père. Non ! Ils ne peuvent pas tous périr là ! Sans eux, leurs familles seraient dans la misère !

Deux mineurs exaspérés sont sur le point de se battre. On entend: “Laissons-les faire, si l’un d’eux est tué, il nous servira de nourriture”. Ces paroles ont pour effet de calmer aussitôt les deux belligérants. Au départ, craignant d’être submergés, ils n’allaient plus au bord de l’eau que pour juger de son niveau; maintenant, privés de lumière, ils y vont en tâtonnant, dans l’espoir vain d’y trouver le corps d’un de leurs camarades, pour se le partager…

Après avoir dévoré les chandelles qui leur étaient restées et préférant boire leur urine qu’une eau infecte, les uns tombent d’inanition, les autres sont en proie au délire. Tous de la manière la plus injuste, accusent Goffin de leur malheur et le maudissent. Surmontant son propre épuisement, il cherche à les calmer; il les appelle par leur nom, espérant que ceux qui ne répondent pas auront réussi à remonter au jour.

Enfin, après cinq jours et cinq nuits passés dans la plus cruelle anxiété, les mineurs piégés entendent au travers de la paroi de leur cavité des coups réitérés. Ils répondent, ils ont été entendus; les coups redoublent, se rapprochent, les sauveteurs sont là, une brèche est créée, de l’air frais leur arrive, ils pourront sortir, ils sont sauvés !

On les compte: sur cent vingt-sept, trente-cinq sont remontés dès le début, vingt-deux se sont noyés, et soixante-dix sont maintenant revenus à l’air libre. Goffin et son fils sortent les derniers. Il est difficile de se faire une idée de la joie des femmes et des enfants des mineurs qui ont échappé à la mort. Tous veulent pénétrer dans l’enceinte du charbonnage pour les serrer dans leurs bras.

Cet événement eut des répercussions dans l’Europe entière. Pendant tout le temps où les mineurs étaient enfouis, les journaux donnaient quotidiennement des informations concernant l’état des travaux entrepris pour les délivrer, nouvelles que, chaque matin, le public attendait avec une curiosité anxieuse. Hubert Goffin est salué en héros. Son acte héroïque fait rapidement le tour d’Europe napoléonienne. Une collecte à l’échelle de tout l’Empire rassemble une somme permettant d’indemniser les familles des victimes.

L’Empereur lui-même est sensibilisé et décide d’accorder le titre de chevalier de la Légion d’honneur à Hubert Goffin, qui devient ainsi le premier ouvrier à recevoir cette distinction. La célébration a lieu à l’hôtel de ville de Liège, le 22 mars 1814 et est aussi l’un des derniers actes officiels posés par la France impériale en pays wallon. Goffin devient alors un “objet politique”, comme le montre le titre de chevalier du Lion de Belgique que s’empresse de lui décerner, en 1815, le nouveau roi Guillaume des Pays-Bas.

Pour Hubert Goffin, certes honoré et bénéficiant d’une petite pension annuelle, les événements ne modifient guère sa vie. Il continue à se rendre quotidiennement à la mine, jusqu’à ce matin du 5 juillet 1821 où, appelé à la rescousse pour éteindre un incendie à la houillère du Bois de Saint-Gilles, à Sclessin, il ne peut éviter une violente explosion due au grisou. Projeté contre la paroi, il meurt sur le coup.

Seul, son fils Mathieu, qui l’avait accompagné dans son acte de bravoure, avait vu son existence bouleversée: Napoléon avait ordonné que l’adolescent fréquente les cours du Lycée de Liège, aux frais de l’État…