En juillet 1799, dans une ancienne forteresse turque, à Rachid (que les français appelleront Rosette), des travaux sont dirigés par un jeune officier du génie, le lieutenant Pierre-François-Xavier Bouchard, 28 ans, qui avait juste passé, en Égypte même, son examen de sortie de l’École polytechnique.
Son attention est attirée, dans un coin du fort, par un bloc de granit sombre de 112 cm de hauteur sur 76 cm de large et 28 cm d’épaisseur, écorné à sa partie supérieure et sur le côté, que les soldats ont beaucoup de mal à relever. Il pèse en effet un peu plus de 760 kg !
Sur cette pierre, trois types d’inscriptions.
– En haut, sur 14 lignes, des hiéroglyphes, l’écriture sacrée des pharaons égyptiens, que plus personne ne comprend depuis au moins quinze siècles.
– Au milieu, sur 32 lignes, une écriture que les savants de l’expédition ne parviennent pas à identifier. Écriture syriaque (langue des anciennes Syrie et Palestine) ? Copte (langue des premiers chrétiens d’Égypte) ? Ce n’est que plus tard qu’on identifiera cette écriture comme démotique, simplification des hiéroglyphes.
– En bas, 54 lignes de grec ancien.
L’Institut d’Égypte est alerté, dès le 29 juillet, par un rapport de l’ingénieur des Ponts et Chaussées Lancret. Et, le 15 septembre, dans le n° 37 du Courier (sic) d’Égypte , on retrouve: “Cette pierre offre une grand intérêt pour l’étude des caractères hiéroglyphiques; peut-être en donnera-t-elle la clef.”
Des copies de cette pierre sont réalisées par Nicolas Conté et Adrien Raffeneau-Delille. Le général Dugua, rentrant en France en mars 1800, en apporte une à l’Institut de France.
Bonaparte considère lui-même que parmi les gains majeurs de l’Expédition d’Égypte, il y a l’étude du percement de l’Isthme de Suez et cette découverte de la Pierre de Rosette.
Lors de la capitulation de 1801, les Anglais exigent la livraison des objets archéologiques. Avec deux obélisques, des sarcophages, le poing d’une statue colossale de Ramsès II, la Pierre de Rosette est considérée comme prise de guerre. Elle est transférée, en 1802, au British Museum, où l’on inscrit à la peinture blanche sur un côté “Captured in Egypt by the British Army in 1801” et sur l’autre “Presented by King George III”.
La Pierre de Rosette est aujourd’hui l’un des joyaux du British Museum, à Londres, où jamais ne se rendit Champollion…