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18 OCTOBRE 1805 : ULM – 6e BULLETIN DE LA GRANDE ARMÉE

18 OCTOBRE 1805 : ULM - 6e BULLETIN DE LA GRANDE ARMÉE

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Ottobre 18, 2022    
12:00 am

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La journée d’Ulm a été une des plus belles journées de l’histoire de France. La capitulation de la place est ci-jointe, ainsi que l’état des régiments qui y sont enfermés. L’Empereur eût pu l’enlever d’assaut; mais 20,000 hommes, défendus par des ouvrages et par des fossés pleins d’eau, eussent opposé de la résistance, et le vif désir de Sa Majesté était d’épargner le sang. 

Le général Mack, général en chef de l’armée, était dans la ville: c’est la destinée des généraux opposés à l’Empereur d’être pris dans des places. On se souvient qu’après les belles manœuvres de la Brenta, le vieux feld-maréchal Wurmser fut fait prisonnier dans Mantoue; Melas le fut dans Alexandrie; Mack l’est dans Ulm.

L’armée autrichienne était une des plus belles qu’ait eues l’Autriche: elle se composait de 14 régiments d’infanterie formant l’armée dite de Bavière, de 13 régiments de l’armée du Tyrol et de 5 régiments venus en poste d’Italie, faisant 32 régiments d’infanterie, et de 15 régiments de cavalerie.

L’Empereur avait placé l’armée du prince Ferdinand dans la même situation où il plaça celle de Melas. Après avoir hésité longtemps, Melas prit la noble résolution de passer sur le corps de l’armée française; ce qui donna lieu à la bataille de Marengo. Mack a pris un autre parti: Ulm est l’aboutissant d’un grand nombre de routes; il a conçu le projet de faire échapper ses divisions par chacune de ces routes, et de les réunir en Tyrol et en Bohême. Les divisions Hohenzollern et Werneck ont débouché par Heidenheim. Une petite division a débouché par Memmingen. Mais l’Empereur, dès le 20 [12 octobre] accourut d’Augsbourg devant Ulm, déconcerta sur-le-champ les projets de l’ennemi, et fit enlever le pont et la position d’Elchingen, qui remédia à tout.

Le maréchal Soult, après avoir pris Memmingen, s’était mis à la poursuite des autres colonnes. Enfin il ne restait plus au prince Ferdinand d’autre ressource que de se laisser enfermer dans Ulm ou d’essayer, par des sentiers, de rejoindre la division de Hohenzollern. Ce prince a pris ce dernier parti; il s’est rendu à Aalen avec quatre escadrons de cavalerie.

Cependant le prince Murat était à la poursuite du prince Ferdinand. La division Werneck a voulu l’arrêter à Langenau: il lui a fait 3,000 prisonniers, dont un officier général, et lui a enlevé deux drapeaux. Tandis qu’il manœuvrait par sa droite à Heidenheim, le maréchal Lannes marchait par Aalen et Noerdlingen. La marche de la division ennemie était embarrassée par 500 chariots et affaiblie par le combat de Langenau. A ce combat, le prince Murat a été très satisfait du général Klein. Le 20e régiment de dragons, le 9e d’infanterie légère et les chasseurs de la garde impériale se sont particulièrement distingués. L’aide de camp Brunet a montré beaucoup de bravoure.

Ce combat n’a point retardé la marche du prince Murat. Il s’est porté rapidement sur Neresheim, et le 25 [17 octobre], à cinq heures du soir, il est arrivé devant cette position. La division de dragons du général Klein a chargé l’ennemi. 

Deux drapeaux, un officier général et 1,000 hommes ont été de nouveau pris au combat de Neresheim. Le prince Ferdinand et sept de ses généraux n’ont eu que le temps de monter à cheval. On a trouvé leur dîner servi. Depuis deux jours, ils n’ont aucun point pour se reposer. Il paraît que le prince Ferdinand ne pourra se soustraire à l’armée française qu’en se déguisant ou en s’enfuyant avec quelques escadrons par quelque route détournée d’Allemagne.

L’Empereur, traversant une foule de prisonniers ennemis, un colonel autrichien témoignait son étonnement de voir l’Empereur des Français trempé, couvert de boue, autant et plus fatigué que le dernier tambour de l’armée; un de ses aides de camp lui ayant expliqué ce que disait l’officier autrichien, l’Empereur lui fit répondre: « Votre maître a voulu me faire ressouvenir que j’étais un soldat; j’espère qu’il conviendra que le trône et la pourpre impériale ne m’ont pas fait oublier mon premier métier. »

Le spectacle que l’armée offrait dans la journée du 23 [15 octobre] était vraiment intéressant. Depuis deux jours la pluie tombait à seaux, tout le monde était trempé; le soldat n’avait point eu de distributions; il était dans la boue jusqu’aux genoux; mais la vue de l’Empereur lui rendait la gaieté, et, du moment qu’il apercevait des colonnes entières dans le même état, il faisait retentir le cri de Vive l’Empereur !

On rapporte aussi que l’Empereur répondit aux officiers qui l’entouraient et qui admiraient comment, dans le moment le plus pénible, les soldats oublient toutes les privations et ne se montrent sensibles qu’au plaisir de le voir: « Ils ont raison, car c’est pour épargner leur sang que je leur fais essuyer de si grandes fatigues. »

L’Empereur, lorsque l’armée occupait les hauteurs qui dominent Ulm, fit appeler le prince de Liechtenstein, général major, enfermé dans cette place, pour lui faire connaître qu’il désirait qu’elle capitulât, lui disant que, s’il la prenait d’assaut, il serait obligé de ce qu’il avait fait à Jaffa, où la garnison fut passée au fil de l’épée; que c’était le triste droit de la guerre; qu’il voulait qu’on lui épargnât, et à la brave nation autrichienne, la nécessité d’un acte effrayant; que la place n’était pas tenable; qu’elle devait donc se rendre. 

Le prince insistait pour que les officiers et soldats eussent la faculté de retourner en Autriche. « Je l’accorde aux officiers et non aux soldats, a répondu l’Empereur; car, qui me garantira qu’on ne les fera point servir de nouveau ? Puis, après avoir hésité un moment, il ajouta: « Eh bien ! je me fie à la parole du prince Ferdinand. S’il est dans la place, je veux lui donner une preuve de mon estime, et je lui accorde ce que vous me demandez, espérant que la cour de Vienne ne démentira pas la parole d’un d’un de ses princes. » Sur ce que M. de Liechtenstein assura que le prince Ferdinand n’était point dans la place: « Alors je ne vois pas, dit l’Empereur, qui peut me garantir que les soldats que je vous renverrai ne serviront pas.

Une brigade de 4,000 hommes occupe une porte de la ville d’Ulm. Dans la nuit du 24 au 25 [16 au 17 octobre] a rompu la plus grande partie de ses ponts, ce qui nous gêne beaucoup pour nos subsistances.

Dans la journée du 23 [15 octobre], le maréchal Bernadotte a poussé ses avant-postes jusqu’à Wasserburg et Haag sur la chaussée de Braunau. Il a fait encore 4 à 500 prisonniers à l’ennemi, lui a enlevé un parc de dix-sept pièces d’artillerie de divers calibres; de sorte que, depuis son entrée à Munich, sans perdre un seul homme, le maréchal Bernadotte a pris 1,500 prisonniers, dix-neuf pièces de canon, 200 chevaux et un grand nombre de bagages.

L’Empereur a passé le Rhin le 9 vendémiaire [1er octobre], le Danube le 14 [6 octobre – en fait le 7] à cinq heures du matin; le Lech le même jour, à trois heures de l’après-midi; ses troupes sont entrées à Munich le 20 [12 octobre]. Ses avant-postes arrivés sur l’Inn le 23 [15 octobre]. Le même jour il était maître de Memmingen et, le 25 [17 octobre], d’Ulm.

Il avait pris à l’ennemi, aux combats de Wertingen, de Günzburg, d’Elchingen, aux journées de Memmingen et d’Ulm, et aux combats d’Albeck, de Langenau et de Neresheim, 40,000 hommes, tant infanterie que cavalerie, plus de quarante drapeaux, un très-grand nombre de pièces de canon, de bagages, de voitures, etc. Et, pour arriver à ces grands résultats, il n’avait fallu que des marches et des manœuvres.

Dans ces combats partiels, les pertes de l’armée française ne se montent qu’à 500 morts et à 1,000 blessés. Aussi le soldat dit-il souvent: « L’Empereur a trouvé une nouvelle méthode de faire la guerre, il ne se sert que de nos jambes et pas de nos baïonnettes. » Les cinq sixièmes de l’armée n’ont pas tiré un coup de fusil, ce dont ils s’affligent. Mais tous ont beaucoup marché, et ils redoublent de célérité quand ils ont l’espoir d’atteindre l’ennemi.

On peut faire en deux mois l’éloge de l’armée: elle est digne de son chef.

On doit considérer l’armée autrichienne comme anéantie. Les Autrichiens et les Russes seront obligés de faire beaucoup d’appels de recrues, pour résister à l’armée française, qui est venue à bout d’une armée de 100,000 hommes sans éprouver, pour ainsi dire, aucune perte.