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11 NOVEMBRE 1805 : EN ROUTE VERS AUSTERLITZ, LA BATAILLE DE DÜRRENSTEIN

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11 NOVEMBRE 1805 : EN ROUTE VERS AUSTERLITZ, LA BATAILLE DE DÜRRENSTEIN

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Novembre 11, 2022    
12:00 am

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Ce 11 novembre 1805, 20 brumaire an XIV, non loin du lieu où, en 1192, Richard Cœur de Lion avait été retenu prisonnier, trois semaines après la reddition d’Ulm, les armées françaises commandées par le maréchal Mortier affrontent, en effectif très inférieur, dans la vallée de la Wachau, sur le Danube, les russes de Koutouzov.

 

  • Lisons, de Jacques Garnier, l’excellent “Austerlitz, 2 décembre 1805”:

 

Napoléon pense que Koutouzov, sensible aux suppliques de l’Autriche, tentera d’arrêter la Grande Armée sur la route de Vienne au niveau de Sankt Pölten. Il manœuvre en conséquence, n’hésitant pas à faire prendre à Davout, Marmont et Bernadotte le mauvais chemin allant de Steyer à Maria-Zell et Lillienfeld, ce qui doit permettre de tourner la position de Sankt Pölten. Mais c’est mal connaître Koutouzov et sa déjà proverbiale prudence…

 

Le nouveau corps commandé par Mortier est composé des divisions Dupont (du 6e corps de Ney), Dumonceau (Hollandais du 2e corps de Marmont), Gazan ( du 5e corps de Lannes), et la division de dragons du général Klein. Il a pour mission de se maintenir sur la rive nord, un peu en arrière de Lannes, qui emprunte, lui, la rive sud.

 

Cependant, Koutouzov, peu soucieux d’être immolé à la plus grande gloire de la Cour de Vienne, passe le Danube à Krems, à 60 km en amont de Vienne. La pièce qui va se jouer n’est plus du tout celle qu’attendait Napoléon. Fini la manœuvre de contournement de Sankt Pölten. Les soldats de Davout, Marmont et Bernadotte se sont échinés pour rien dans d’épouvantables chemins. Le pire, c’est que Mortier, quelque peu esseulé sur la rive gauche et qui n’est pas prévenu de ce changement, court à la catastrophe. 

 

Après avoir traversé le fleuve, Koutouzov se rend en effet compte qu’avant de poursuivre sa retraite il peut réussir un coup en attaquant la division Gazan, qui marche en tête de la colonne Mortier et qui est assez isolée; il est conseillé par l’Autrichien Schmidt qui connaît parfaitement le terrain.

 

Le lieu où va se jouer le drame est impressionnant: de hautes falaises longent le Danube, ne laissant la place qu’à une route très étroite coupée par le village médiéval de Dürrenstein, lui-même dominé par un château féodal, où fut jadis retenu prisonnier Richard Cœur de Lion au retour de sa croisade. Le théâtre est grandiose, mais il y a fort à parier que les soldats de Gazan ont manqué de temps pour l’apprécier…

 

De fait, ils ne sont que 6.000 et ont en face d’eux 50.000 ennemis (Koutouzov a reçu le renfort du corps de Rosen). Ils sont attaqués de front par les 3 200 hommes de Miloradovitch, de flanc par les 2.600 hommes de Stryck et, en queue, par les 9.000 hommes de Doctorov. Essen et la cavalerie de  Bagration sont en couverture.

 

Miloradovitch passe à l’offensive le 11 novembre au matin. À 10 heures, les Français sont toujours maîtres du terrain, mais, vers midi et demi, Stryck débouche sur leur gauche. Vers 15 heures, Mortier, qui a pris personnellement la direction des opérations, réussit cependant à l’arrêter. Il croit l’affaire terminée, puisque Dupont doit maintenant être proche. 

 

Malheureusement, à la nuit tombante, ce n’est pas Dupont qui arrive, mais Doctorov: son avant-garde marche sur Mortier pendant que le gros de ses forces est chargé de contenir Dupont. C’est le moment que choisissent Miloradovitch et Stryck pour reprendre l’offensive. La situation de Mortier et de Gazan est désespérée, si désespérée que les soldats de Mortier insistent pour qu’il s’échappe en barque et rejoigne l’autre rive du Danube où il trouvera le salut. Chevaleresque, peut-être inspiré par le souvenir de Richard Coeur de Lion, il refuse et retourne au combat.

 

Il semble que le mot “désespoir” n’existe pas dans le vocabulaire des soldats des premières campagnes de l’Empire: Mortier et Gazan se placent entre les deux bataillons de tête du 100e de ligne et, précédés par les grenadiers, se battent comme de simples soldats, passent à travers les Russes, en direction de Dupont. La colonne pénètre, la baïonnette basse, dans l’unique rue de Dürrenstein, au milieu des Russes. Ceux-ci, entassés dans un chemin trop étroit pour pouvoir se déployer, attaquée avec rage par les grenadiers, se débandent. Mortier et Gazan font leur jonction à 4 kilomètres de Dürrenstein. 

 

Ségur raconte: “Le colonel autrichien Schmidt, qui guidait le corps russe maître de Dürrenstein, s’en élance  pour achever la destruction de la colonne française. Le général Fabvier, qui l’avait entendu, le laisse approcher sans être lui-même vu, et décharge sa pièce à bout portant sur la tête de l’attaque, la renverse, tuant en même temps le colonel Schmidt”. C’est une très grande perte pour les Alliés, car Schmidt était un chef d’état-major certainement supérieur à Weirother qui le remplacera et œuvrera à Austerlitz. 

 

Dupont, de son côté, a réussi à repousser Doctorov. Les Français perdent 1.700 hommes, les Russes 900, mais le corps, qui semblait voué à l’anéantissement, est sauvé. Mortier le fait immédiatement repasser sur la rive droite.

 

  • Saluons le major Henriot:

 

Dans la nuit du 11 novembre 1805, à Dürrenstein, sur le plateau de Leoben, les 4.000 Français de Mortier sont quasiment encerclés par 24.000 russes de Koutouzov. Situation désespérée. Devant et derrière eux, des masses énormes de Russes, à gauche une falaise infranchissable, et à droite le Danube.

 

Alors que Mortier consulte son état-major, le major Henriot lui propose un plan audacieux, voire téméraire pour sauver la division. Il propose d’attaquer sans attendre. Mortier acquiesce. 

 

Henriot harangue ses grenadiers: “Camarades, nous sommes enveloppés par 30.000 Russes et nous ne sommes que 4.000, mais les Français ne comptent point leurs ennemis. Nous leur passerons sur le ventre. Grenadiers du 100e régiment, à vous l’honneur de charger les premiers. Souvenez-vous qu’il s’agit de sauver les aigles françaises”. 

 

Réponse unanime: “Major, nous sommes tous grenadiers”. Henriot fait alors tirer ses six derniers boulets, ordonne la charge, et recommande à ses soldats de crier tous ensemble: “Point de quartier, ce sont les Russes !” 

 

La première section attaque à la baïonnette, et tire quasiment à bout touchant sur les Russes, puis se replie immédiatement sur les côtés, laissant place à une autre section, et ainsi de suite. Les premières lignes russes, épouvantées par les cris et le bruit des détonations, sont refoulées sur leur centre, et c’est alors une grande confusion, puis une déroute totale. 

 

Pour la couvrir, les Russes incendient les maisons du village de Leoben, dans lesquelles se sont réfugiés leurs blessés. 500 d’entre-eux meurent dans l’embrasement général. 

 

Cette nuit, les Russes, attaqués par des français très inférieurs en nombre, perdent 6 000 hommes, trois officiers généraux, des drapeaux, des pièces d’artillerie et des milliers de fusils.

  • Qu’en dit le vingt-deuxième bulletin de la Grande Armée ?

 

Le 20 à la pointe du jour, le maréchal Mortier, à la tête de six bataillons, s’est porté sur Stein. Il croyait y trouver une arrière-garde, mais toute l’armée russe y était encore, ses bagages n’ayant pas filé; alors s’est engagé le combat de Diernstein, à jamais mémorable dans les annales militaires. Depuis six heures du matin jusqu’à quatre heures de l’après-midi, ces quatre mille braves firent tête à l’armée russe, & mirent en déroute tout ce qui leur fut opposé.

 

Maîtres du village de Loiben, ils croyaient la journée finie: mais l’ennemi, irrité, d’avoir perdu dix drapeaux, six pièces de canon, neuf cents hommes faits prisonniers, & deux mille hommes tués, avait fait diriger deux colonnes par des gorges difficiles, pour tourner les français. Aussitôt que le maréchal Mortier s’aperçut de cette manœuvre, il marcha droit aux troupes qui l’avaient tourné, & se fit jour au travers des lignes de l’ennemi, dans l’instant même où le 9e régiment d’infanterie légère & le 32e d’infanterie de ligne, ayant chargé un autre corps russe, avaient mis ce corps en déroute, après lui avoir pris deux drapeaux & 400 hommes.

 

Cette journée a été une journée de massacre. Des monceaux de cadavres couvraient un champ de bataille étroit. Plus de quatre mille russes ont été tués ou blessés; treize cents ont été faits prisonniers. Parmi ces derniers se trouvent deux colonels.

 

De notre côté, la perte a été considérable. Le 4e & le 9e d’infanterie légère ont le plus souffert. Les colonels du 100e & du 103e ont été légèrement blessés. Le colonel Watier, du 4e régiment de dragons, a été tué. S.M. l’avait choisi pour un de ses écuyers. C’était un officier d’une grande valeur. Malgré les difficultés du terrain, il était parvenu à faire, contre une colonne russe, une charge très brillante; mais il fut atteint d’une balle, & trouva la mort dans la mêlée.